Allez, il est grand temps que j’expose au grand jour mes
goûts de chiotte. Parlons donc d’un film avec Eric & Ramzy. Considéré comme
culte à l’époque de La Tour Montparnasse Infernale, l’humour du duo semble
avoir perdu de sa superbe avec le poids des ans. Leur seconde grosse production
a donc bien peu de considération aujourd’hui. Il faut dire que la collusion de
leur humour avec l’action « à la française » (Gérad Pirès a réalisé le
premier Taxi) a de quoi faire grincer des dents des cinéphiles les plus
avertis. Mais après tout, il faut remettre les choses à leur place. Double Zéro
n’a, il me semble, jamais eu la prétention d’être un chef d’œuvre. C’est une comédie
d’action un brin parodique, totalement idiote et rétrograde mais c’est
complètement assumé, alors what ze fuck ? Posons nos neurones et
apprécions ce film pour ce qu’il est.
Double Zéro démarre alors qu’un missile est volé de
manière assez spectaculaire au beau milieu de la sibérie par la sculpturale
Natty Dreads (Georgianna Robertson). La DGSE française est sur les dents, mais
craint qu’une taupe ne se soit infiltrée dans leurs services. Pour éviter de
faire courir à leurs meilleurs agents un risque inconsidéré, l’agence recrute
par le biais du Monologu... euh, du Monocle (Rossy De Palma) deux « chèvres », soit non
pas deux mauvais joueurs de foot mais deux civils totalement inoffensifs qui
vont jouer le rôle de faux agents pour que les vrais puissent travailler dans l’ombre.
Le choix se porte donc sur Ben (Eric Judor), un impulsif, et Will « Le
Sauvage » (Ramzy Bedia) qui se croit irrésistible. Le duo est soumis à un
rude entraînement et doit illico presto se rendre sur le terrain. Ben &
Will vont donc devoir se frotter au « Mâle » (Edouard Baer), dont le
but est de se servir du missile volé pour bombarder la planète d’un spray
stérilisant, et devenir l’unique mâle fécond de la Terre. Entre la côte d’Azur
et la Jamaïque, le duo d’agents incompétents va donc devoir bien malgré lui
sauver le monde…
« Foutue la coupe, foutue ! »
Double Zéro est donc, bien évidemment, rythmé par les
pitreries d’Eric & Ramzy qui à l’époque étaient au sommet de leur
« art ». Comme d’habitude, Eric joue le boulet un brin timide et
Ramzy le beau gosse qui s’y croit de trop, et le duo doit finir par se serrer
les coudes malgré le fait qu’ils ne se supportent pas. Les gags s’enchaînent et
Double Zéro égrène tous les clichés de la parodie de films d’espionnage,
gadgets, armes et bagarres, missions sous couverture à l’appui. Pour peu qu’on
aime l’humour d’Eric & Ramzy et leurs personnages volontairement simplets,
le film est hilarant au minimum la moitié du temps. Eric Judor cabotine à mort comme
d’habitude, et la scène de l’hôtel où il martyrise une serveuse qui a amené
le mauvais champagne est hallucinante. Les débilités habituelles du duo font
mouche (même jusque dans leur faculté inutile à se casser la gueule au moindre
obstacle), les dialogues primitifs aussi, le tout digne de leurs performances
sur scène. Si l’on ne retrouve pas de répliques cultes comme dans La Tour
Montparnasse Infernale, les « ok, je vais te péter la gueule », « je
pète un câble » ou autre « put the coconut down ! » font
leur petit effet. Suffit d’apprécier la comédie mononeurone et ça passe tout
seul. Le film n’est également pas avare en scènes un peu plus spectaculaires,
même si on est loin d’avoir affaire à un Die Hard ou un Taken.
Excepté le duo, Double Zéro est également servi par une
pléiade de seconds rôles assez savoureux. Entre Didier Flamand qui campe un
directeur de la DGSE tout excité (« excellent, excellent ! »), un
général froid et antipathique (Christophe Odent), un Robinson Crusoé obsédé mais
débrouillard (Nicky Marbot), et surtout le fantasque Bob d’Auckland (François
Chattot) auteur de la scène la plus incongrue du film où on le voit flinguer un
gars perché dans un arbre et dégommer un bateau au lance-roquettes sans raison
(« non non c’est pas des espions, c’est juste des mecs qui me font chier,
voilà tout ! »), et ce n’est rien à côté de son copain Potemkine.
Edouard Baer s’amuse dans la peau du méchant mâle, sans réel plus si ce n’est
qu’il est systématiquement accompagné de bonnasses. Et Double Zéro fait fort de
ce côté en alignant les top-models aux formes généreuses, Georgianna Robertson
en tête mais également les sœurs Bogdanova dont la sublime Alexandrie campée
par Inna Zobova. Et lesdites bonnasses font des danses lascives où se crêpent
le chignon à l’occasion. Outre Lionel Abelanski en Q de service, le film se
paye donc un casting sans grands noms mais un casting qui parvient à convaincre
sans trop de mal, toujours dans l’esprit totalement débridé et volontairement
bas du front du film.
Bref, Double Zéro joue à fond la carte de la comédie d’action
crétine, et dans ce registre ça fonctionne sans trop de mal. Il faut aimer la
Eric & Ramzy touch, il faut aimer l’action basique à la Taxi, il faut
accepter de poser son cerveau sur la table de chevet pendant une heure et
demie. Double Zéro se place derrière La Tour Montparnasse Infernale et Seuls Two dans mon panthéon Eric & Ramzyesque, mais après X visionnages j’ai
toujours autant de plaisir à le revoir et à rire à haute voix devant les gags
débiles. Débile, c’est le mot et il ne faut pas s’attendre ici à quelconque
philosophie. Pris dans un carcan de bon délire, Double Zéro est une réussite et
remplit donc sa mission.
Note : 008/10
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