Et l’OFNI de l’année est une production
franco-canadienne, réalisée et scénarisée par un… argentin. Enfin OFNI de l’année
2012 vu que c’est l’an dernier qu’il est initialement sorti, mais vu le bestiau
il peut bien obtenir le titre sur deux années consécutives. Après le niaiseux
Les Âmes Vagabondes, voilà à nouveau un film qui mêle science-fiction et
romance. Ce n’est pas très original mais le reste du concept de Upside Down est
somme toute inédit. Un monde sans dessus-dessous est au programme et la
réalisation sera à l’avenant. Je pense que tout le monde aura eu l’occasion de
voir quelques images et le concept, basé sur des gravités inversées et des gens
qui vivent au sol, d’autres au plafond, est intriguant. Ce qui est à la base
une banale fiction légèrement dystopienne racontant une histoire d’amour
sommaire va bien vite se transformer en un film d’une originalité sans bornes
qui a su, à l’instar de films comme Time Out, se créer son propre univers régi
par ses propres codes. On s’accroche et on prépare son cou et ses yeux car il
va falloir sans cesse regarder en haut. Ou en bas. Ou les deux à la fois.
Dans un système solaire éloigné du nôtre, deux planètes
sont liées entre elles mais chacune d’entre elles est régie par ses propres
lois de gravité. Il y a donc un monde « En-Haut » et un monde « En-Bas »,
séparés par seulement quelques mètres sur les points culminants. Tout ce qui
vient d’une planète (matières et personnes) est uniquement affecté par la gravité de sa planète d’origine,
et ne peut donc pas perdurer sur l’autre planète sous peine de causer des
difficultés d'attraction gravitationnelle voire pire, de brûler. Les deux mondes sont donc
séparés, et les riches vivent En-Haut tandis que la population d’En-Bas est
pauvre et bien peu considérée par ceux d’En-Haut. Adam (Jim Sturgess), habitant
d’En-Bas, sympathise avec Eden (Kirsten Dunst) qui vit En-Haut, à l’occasion de
ballades en montagne. Les deux tourtereaux entament une liaison qui est bien
sûr interdite. Repérés pendant un flirt, les deux amoureux vont être séparés et
Eden va subir une violente chute, Adam la croyant alors morte. 10 ans plus
tard, ce dernier va pourtant apprendre qu’elle est vivante via une émission de
télévision. Pour se rapprocher d’elle et la reconquérir, Adam va se faire
embaucher au sein d’une puissante entreprise qui a la particularité de faire
travailler à la fois des gens d’En-Haut et d’En-Bas au sein d’un bâtiment qui
relie les deux planètes. A l’aide d’un collègue de travail d’En-Haut, Bob
(Timothy Spall), Adam va alors infiltrer le monde d’En-Haut…
Upside Down est un film scientifique dans le sens où il
invente ses propres lois de physique gravitationnelle pour expliquer les
différences entre les deux mondes. Le tout est expliqué dans l’introduction du
film et d’autres détails sont distillés tout au long du film. Et bien que je
sois loin d’être un spécialiste en physique gravitationnelle, certains trucs sont
quand même illogiques et incohérents et plusieurs fois on s’exclamera « mais
comment c’est possible ! ». De nombreuses questions se posent (je ne
vais pas rentrer dans les détails mais un exemple : si le gag de l’urine
qui va au plafond lorsque qu’un gars d’En-Bas pisse quelque part En-Haut est
pris de but en blanc, il se pose la question du reste des liquides corporels :
le sang devrait remonter à mort au cerveau et les jambes ne seraient plus trop
irriguées…), et n’importe quel physicien s’arrachera les cheveux à plusieurs
reprises. Enfin bref, ce n’est qu’un film après tout… et de par l’existence d’un
film cumulant les aberrations scientifiques comme Fusion - The Core, on est
prêts à tout pardonner. D’autant que Upside Down est un film plutôt fantastique
voire même onirique. Et c’est là que ça fonctionne, car Juan Solanas a vraiment
réussi à créer son univers avec ses lois bien particulières, et le concept est
exploité à fond, au centre de la plupart des pérégrinations du héros du film,
Adam. C’est totalement WTF, mais on se laisse vite emporter au sein de ce monde
incroyable et sidérant.
Surtout que l’argentin, inconnu au bataillon, sait y
faire au niveau des images qui sont souvent monumentales et superbes, quoiqu’un
peu artificielles. Les prouesses techniques ne sont pas loin, notamment lorsque
les gens d’En-Haut et d’En-Bas cohabitent au plus près. D’autres devraient en
prendre de la graine et Upside Down prend finalement une tournure assez
fantastique, plus que de Science-Fiction vu que la « Science » est
tout de même bafouée dans ses grandes largeurs. C’est beau et léché et servi
par un ensemble d’idées malines et bien exploitées au service du concept de
gravitations inverses. On suit avec plaisir les différentes facéties d’Adam,
servi par un excellent Jim Sturgess parfaitement taillé pour le rôle. L’acteur
vu dans Cloud Atlas plus tôt cette année porte le film à lui tout seul, et
étrangement Kirsten Dunst n’a pas grand-chose à faire. Timothy Spall, dans le
rôle du débonnaire collègue de travail d’Adam, est une des bonnes surprises du
film. Film qui ne brille pas forcément par son scénario, surtout prétexte aux
nombreuses scènes qui font intervenir les concepts gravitationnels, et qui
souffre de quelques trous ou raccourcis surtout sur la fin. Ceci se fait donc
au détriment de la romance, qui en reste à l’essentiel et ne part pas dans le
dégoulinant, mais aussi au détriment de l’aspect « social » du film
avec les gens d’En-Bas qui sont mis au ban de la société. Mais bon, on est pas
chez Neill Blomkamp non plus et Upside Down reste un film léger et coloré de science-fiction
fantastique et onirique, quasi-hallucinatoire, qui au final tient ses
promesses.
De légères faiblesses font qu’Upside Down ne peut pas
viser plus haut que le titre du film le plus original de l’année. Mais pour cet
aspect, le film franco-canado-argentin est une réussite totale. Passés les
exagérations scientifiques de rigueur qui rendent dubitatifs sur le concept,
Juan Solanas a su exploiter l’univers onirique qu’il a créé à la perfection,
avec des idées et des scènes finalement excellentes, portées par un Jim
Sturgess au meilleur de sa forme. Et la beauté de l’ensemble ne peut laisser
indifférent, de même que la pure création qui semble tout droit sorti de l’esprit
d’Ariane dans Inception. Un film au concept inédit et prenant, qui réserve un
lot de bonnes surprises et qui possède plusieurs degrés de visionnage, selon qu’on
s’intéresse à l’histoire, aux images ou aux concepts de gravitation qui sont
exploités à fond (même si des détails posent des questions légitimes). Un super
film assez inclassable et transgenre, qui dépasse le stade de simple curiosité
et mérite d’être vu par tout le monde, ne serait-ce que pour apprécier le
talent de Juan Solanas pour créer quelque chose de résolument original.
Note : 8/10
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