vendredi 30 août 2013

Le dernier pub avant La fin du monde

Edgar Wright + Simon Pegg + Nick Frost. Le trio infernal qui a enfanté la série méconnue Spaced au début des années 2000 (tellement méconnue que je ne l’ai toujours pas vue…) s’est bien vite mis au cinéma pour donner naissance à une trilogie infernale baptisée « Blood and Ice Cream » (parce qu’il y a du sang et des Cornettos), créant leur propre patte au sein de comédies déjantées. Shaun Of The Dead est déjà un film culte mais personnellement je ne l’ai jamais trop aimé, c’est une comédie d’horreur banale et poussive juste portée par sa réalisation et ses acteurs. En revanche, Hot Fuzz est une tuerie intergalactique, délivrant un scénario malin, des gimmicks qui arrachent et une fin qui dépote. Après une absence de 6 ans marquée par un film du duo Pegg-Frost sans Edgar Wright (Paul), voilà le retour tant attendu du trio britannique pour clore cette trilogie dans une certaine apocalypse. On avait attendu les extraterrestres (qui ont finalement débarqué pour Paul), on attendait la fin du monde (le film devait à la base sortir aux alentours du 21 décembre 2012…), on aura les deux dans Le dernier pub avant La fin du monde, ainsi que comme prévu du sang (même si c’est un sang un peu particulier…) et de la glace (même s’il faut l’attendre !). Et l’humour corrosif du trio de même que la mise en scène coup-de-poing. La totale.

A la fin des années 80, une bande de 5 potes décide de faire en une soirée le « barathon de la voie maltée » dans une charmante bourgade anglaise, Newton Heaven : il s’agit de déguster une pinte de bière dans chacun des 12 bars de la ville, jusqu’au dernier répondant au nom de « La fin du monde ». Mais l’échappée tourne court et le quintette s’arrête à 9 bars. 20 ans plus tard, Gary (Simon Pegg), ado attardé fan des Sisters Of Mercy, décide de retrouver ses potes pour refaire et terminer ce qu’ils avaient commencé. Peter (Eddie Marsan), concessionnaire auto très attaché à sa femme et à son père, Oliver « Le maudit » (Martin Freeman), agent immobilier qui ne lâche pas son oreillette bluetooth, Steven (Paddy Considine), travaillant dans le bâtiment et adepte de muscu, et Andy (Nick Frost), chef d’entreprise épanoui mais renfermé, finissent par accepter de suivre Gary dans sa quête, malgré la forte réticence d’Andy qui s’était méchamment brouillé avec Gary suite à un fâcheux accident. Alors que les 5 potes entament la tournée, se remémorant les bons vieux moments et réglant leurs comptes, ils vont se rendre compte que leur bourgade natale a été envahie par des robots extraterrestres… Le quintette, accompagné de la sœur d’Oliver (Rosamund Pike), va alors se disputer sur la marche à suivre pour se tirer de la galère, les pintes s’accumulant dans le gosier n’aidant pas… tandis que Gary est bien déterminé à finir le barathon coûte que coûte.


D’emblée, je vais évacuer les quelques défauts de Le dernier pub avant La fin du monde histoire d’en finir : on notera déjà que la Edgar Wright touch est un peu moins incisive que par le passé, abandonnant presque certains gimmicks des deux premiers films comme les expressions qui reviennent systématiquement une deuxième fois, au contraire des habituels gags. Les dialogues sont moins percutants, à l’image des héros du film finalement : ils ont mûri et sont plus sérieux. Le scénario, bien moins étoffé que celui de Hot Fuzz, n’entretient pas le « mystère » comme avait pu le faire avec brio Shaun Of The Dead également. Au final, après 40 minutes qui servent en quelque sorte d’introduction (le sujet l’exige comme pour les deux autres films), on est direct plongé dans la véritable intrigue et à partir de là, c’est effectivement l’apocalypse filmique et la tuerie. Edgar Wright s’est lâché dans les scènes de bagarres et nous envoie du jamais-vu chez lui, souvent hallucinantes et terriblement jouissives, avec des prises vachement techniques et même de véritables mouvements de catch ! Ce n’est pas cette fois-ci que le déjanté et la WTFerie seront mis de côté, et au final Le dernier pub avant La fin du monde et sans concession le film le plus original et le plus barré du trio. Hormis le premier tiers pépère, ça va à cent à l’heure et ça aligne les poursuites, bagarres et violentes prises de tête entre potes dans un joyeux bordel drôle et efficace. J’ai eu peur que le film soit plat et parte dans le n’importe quoi décevant : il n’en est rien et Le dernier pub avant La fin du monde est tout simplement un pur film dans la tradition Wright/Pegg/Frost, même si un peu différent des deux précédents opus de la trilogie.

Côté scénario, on continue à distiller quelques éléments au fur et à mesure comme d’habitude, permettant de fluidifier et de comprendre l’histoire (et de balancer des guests savoureux comme l’inattendu Pierce Brosnan), mais c’est tout de même moins passionnant que Hot Fuzz. Mais comme toujours c’est un prétexte pour envoyer la sauce dans d’excellentes scènes et on en redemande. Comme toujours chez Edgar Wright, les acteurs sont tous excellents : Simon Pegg est méconnaissable en gothique alcoolo, il cabotine pas mal mais ça change radicalement de Mission Impossible et Star Trek et ça fonctionne. Nick Frost lui vole presque la vedette en fin de film, grâce à un personnage dont le comportement évolue au fil de l’histoire. Martin Freeman, cantonné à des seconds rôles effacés après H2G2 (oui, même dans Le Hobbit on ne le voit pas beaucoup !), a enfin ici un second rôle complet et intéressant. Paddy Considine, dans un rôle presque à contre-emploi, est également excellent tout comme le méconnu Eddie Marsan qui campe le personnage le plus naïf dans la bande. Rosamund Pike tient également un rôle à contre-emploi et s’en sort bien. Après le très Buddy Movie Hot Fuzz, Edgar Wright s’élargit de nouveau à une bande complète et les acteurs portent une nouvelle fois un film délicieusement déjanté, avec des codes bien singuliers de comédie mais aussi d’action, de fantastique et de science-fiction.


Il est juste dommage que Le dernier pub avant La fin du monde se termine sur un grand final dispensable et un peu maladroit, mais ce n’est pas très grave et c’est finalement logique. La trilogie Blood and Ice Cream se termine en apothéose, même si à mon sens Hot Fuzz restera à jamais la plus grande réussite du trio Wright/Pegg/Frost. Le dernier pub avant La fin du monde surpasse déjà pour moi Shaun Of The Dead qui n’était finalement qu’un round d’essai. Ce troisième opus démarre timidement et on a vu les compères plus inspirés pour les dialogues (peut-être est-ce à cause de la VF ? déjà que Pegg et Frost n’ont toujours pas de doubleur attitré…) ainsi que pour les gimmicks incisifs, mais vu que la partie « à fond » du film en constitue tout de même la grande majorité, il serait dommage de bouder ce film pour du pinaillage. Le dernier pub avant La fin du monde est une bonne tuerie jouissive, fun et nawakement contrôlée, c’est l’essentiel et si le trio anglais a fait un peu mieux par le passé, il n’a pas perdu son goût unique pour la comédie transgenre qui fait mouche, servie par des acteurs en forme. Le dernier Cornetto avant l’apocalypse !
Note : 8/10

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