« 4 Blu-Ray pour 30€ », c’est alléchant mais il
faut faire une sélection parmi le relativement maigre choix que propose les
Leclerc ou Cora, entre ce qu’on voulait absolument « régulariser »,
ce qu’on a pas vu et qu’on est au minimum curieux de voir, ou ce qu’on va
choisir par défaut pour en avoir 4 au passage en caisse. En plus de Kingsman : Services Secrets et Mission Impossible 5 : Rogue Nation (que j’avais vu en
salles, lui), j’ai du opter pour Exodus : Gods And Kings par défaut… (c’était
ça ou Le Septième Fils, au milieu de trucs comme Terminator Genisys ou Hitman :
Agent 47 que je n’avais pas spécialement envie de revoir en BR, et bien sûr d’autres
merdes), en revanche j’ai pris en pleine connaissance de cause Night Call. Et
tant pis si ce soir au moment où je publie cet article, il passe pour la
première fois sur OCS… J’en ai entendu beaucoup de bien et je suis enthousiaste
à l’idée de tomber sur un bon Thriller nocturne bien tendu dans le monde du
journalisme sans limites. Film
relativement indépendant (produit par Orange Cinéma, ce qui explique l’exclu
sur OCS…), il est réalisé par Dan Gilroy, scénariste frère de Tony Gilroy
(réalisateur de Jason Bourne : L’Héritage), car comme toujours le cinéma c’est
une affaire de famille… Dan signe ici son premier film et cède à l’appel de la
nuit.
Louis ou « Lou » (Jake Gyllenhaal), un homme
lunatique, gagne sa vie en volant des métaux à Los Angeles. Négociateur
difficile, il veut toujours plus. Un soir, il assiste à un accident sur
l’autoroute et rencontre des reporters sur les lieux, qui grâce à leur maîtrise
arrivent avant la police sur des accidents ou des lieux de crime. Il s’intéresse
à leur métier et décide de partir lui aussi en chasse d’images choc. Maladroit
au début, Louis est persévérant et finit par vendre ses premières images à Nina
(Rene Russo), d’une petite chaîne californienne, convaincue par ses talents
naissants. Louis décide de ne pas s’arrêter là, embauche un associé (Riz
Ahmed), et grâce à son intarissable soif d’apprendre, améliore le nombre et la
qualité de ses reportages. Mais à force d’ambition, Lou va finir par aller
toujours plus loin dans ses négociations et manipulations et courir des risques
insensés…
Il n’y a pas vraiment de surprise. Night Call est bien un
thriller qui se déroule dans un environnement majoritairement nocturne, suivant
les pérégrinations d’un néo-reporter prêt à tout pour avoir les images les plus
choquantes avant tout le monde. De ce côté, Night Call ne révolutionne rien et
se base sur un scénario dès plus simples. Avec bien sûr une critique
sous-jacente de l’info « pute à audience » mais qui n’est pas si
grossière et si développée que ça. Night Call surprend assez car ce n’est donc
pas un pamphlet absolu contre l’information scandale en mode « l’Amérique
a peur », la critique est forcément présente mais ne va pas chercher plus
loin que ce qui a déjà été fait pour le genre. Forcément Thriller, Night Call n’est
pas non plus un film de crime ou même policier. Les crimes et autres évènements
dépeints sont très secondaires et ne servent que d’alibi pour le vrai sujet du
film. Il n’y a pas de ramifications tordues à attendre de ce point de vue, seul
un évènement précis servira de base pour la dernière et plus remarquable partie
du film. Car le vrai sujet du film, c’est bien son personnage principal, Lou
Bloom, campé par Jake Gyllenhaal.
Lou est fou, complètement et terriblement fou. Perfectionniste,
baratineur, tyran, mégalo, et même psychopathe. Flippant dès ses premiers
dialogues, le personnage est l’attraction principale de Night Call, et subjugue
ce film sur l’information assez banal en apparence. Sorte de cas social
extrêmement intelligent qui applique à la lettre ses principes préétablis, Lou
est campé par un Jake Gyllenhaal qui, soyons honnêtes, livre une performance historique.
Les yeux globuleux, le rictus premier degré, la coiffure lisse, l’acteur
américain est habité par un personnage qui semble parfaitement correspondre à l’interprète
de Donnie Darko, qui n’avait d’ailleurs pas vraiment livré un tel rôle de
composition depuis. Night Call est donc avant tout un film sur le personnage de
Lou Bloom, son comportement, ses actions, la façon dont il manipule habilement
son entourage, comme la productrice Nina (campée par Rene Russo) et son « assistant »
Rick (Riz Ahmed), souffre-douleur en puissance qui donne encore plus d’impact
au côté tyrannique et sans pitié du personnage. Night Call est volé par son
personnage fou à lier et inoubliable, effrayant et attachant à la fois, et l’œuvre
de Dan Gilroy n’aurait pas eu grand intérêt si Gyllenhaal ne s’était pas glissé
dans ce costume avec une interprétation purement exceptionnelle.
Servi par une réalisation très « californienne »
qui met bien en valeur le côté chic de Los Angeles, une savante utilisation des
plans fixes (la caméra ne bouge vraiment que lors des scènes d’« investigation »,
ce qui nous donne un splendide côté immersif) et une bonne musique électro,
Night Call réussit habilement son coup avec sa plus-value absolue qu’est le
personnage atypique et corrosif de Lou, campé par un Jake Gyllenhaal au sommet
de son art. Dommage que l’ensemble manque finalement d’un peu de noirceur, qui
finit néanmoins par exploser à la fin, de manière peut-être un peu prévisible d’ailleurs.
S’il ne creuse pas vraiment son côté critique de l’info « Breaking News »
et qu’il ne choisit pas de nous embarquer dans une affaire policière tordue (ce
qui aurait néanmoins pu marcher), Night Call est tout de même un très bon
thriller (servi par des scènes bien tendues) mais, il faut encore le dire, est servi à 99% par son personnage
principal totalement cinglé, au sens pathologique du terme d’ailleurs. Ni trop
ni pas assez « grand public », Night Call est un thriller qui peut
convenir à tout le monde, n’y voyez pas une révolution ni même une vraie
originalité, mais laissez-vous guider dans les nuits agitées de Los Angeles par
le charismatique Lou Bloom… il ne vous laissera pas le choix de toute façon.
Note : 7.5/10
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